vendredi 22 mars 2019

le puits au fond du jardin • didon n’était pas didon... énée non plus !




J’avais pris ma place en croyant qu’il s’agissait de l’opéra de Purcell « Didon et Enée » et puis en lisant les savantissimes critiques parisiens dont ceux, ultra-célébrissimes pour leurs fabuleuses incompétences et leurs monstrueuses conneries, de forumopera.com qui scribouillaient avoir vu et entendu un guitariste électrique et des chanteurs sonorisés, j’ai regretté et j’y suis allé de mauvaise humeur. L’opéra a bien donné «Didon », mais dans une formule saucissonnée aléatoire qui a prolongé Purcell de presque une heure et demi avec des ajouts de bruits, de vociférations, de douceurs, de sonorité venant de l’au-delà, celui que j’ai connu et fréquenté au cinéma chez certains génies. Depuis 50 ans que je hante régulièrement les salles d’opéra, c’est la seconde fois seulement, je j’assiste à un spectacle complet où le metteur en scène est en adéquation totale avec la musique. La première fois c’était, dans cette même salle, il y a deux ou trois ans, un « Tristan » éternel, ni homme, ni légende, ni Dieu, ni mythe, sorti du plus profond de l’inconscient de l’homme qui renvoie l’homme à son origine originelle, poussière sans couleur, sans goût et sans odeur, tromperie de l’amour, perversité de la vie, échec de la pensée. La seconde fois, c’était hier soir, où j’ai assisté à la destruction du mythe, à l’immense petitesse de l’ambition de l’homme, à la perversité des sentiments, au miroir implacable de ce que nous sommes vraiment. L’horreur des cris sans fin de « « Psychose », les symboles – électricité (fils), sol lozanginé, rideau rouge (bleu), nain, géant, maison (celle de Laura Palmer) – de Twin Peaks 3e saison, la copulation – homme et femme animaux -, la pulsion destructrice du mythe par les petites mains des archéologues qui grignotent les sols pour retrouver le passé destructeur où surgissent de la terre, une bouteille d’eau vide... en plastique, un portable rouillé, quelques os décharnés – parties de mains ou de pieds -... rien qui ne puisse se substituer aux mythes antiques qui ont porté l’humanité. C’est quand la maison de Laura se fermera - que personne ne pourra plus y entrer ou en sortir - que le mythe cessera avec l’espoir de revoir un jour celui qui a été homme et qui n’est plus, aujourd'hui, qu’objet pétrifié par son inconscient. Cette grande, savante et utile démonstration de la pensée psychanalytique, cette exploration de l’inconscient, cette manière de montrer les monstres qui nous hantent et qui nous rendent monstres, cet impossible communication entre les choses et les choses, entre les êtres et les êtres, entre les choses et les êtres, entre les êtres et les choses, ont été sublimées par d’immenses artistes, d’immenses voix chantées et parlées et criées et vociférées, par d’immenses musiciens interprètes sous la direction magistrale, rare, quasi unique d’un Pierre Bleuse engagé à fond dans le fond de ce monde insensé qui est pourtant le nôtre au quotidien, quand on sait voir ce qui bouge, ce qui ne bouge pas, ce qui est hors de notre champ de vision et ce qui ne l'est pas. L’opéra tel qu’il devrait être... toujours !  

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