La revanche de Furtwängler
sur l’Histoire, en ce début des années 50, c’était Salzbourg. A tort ou à
raison, aux années noires de la montée du nazisme, il avait estimé que sa place
était dans son pays : et non point seulement pour aider les musiciens
juifs à demeurer des hommes. Tout simplement, plus simplement, pour faire en sorte
que les musiciens demeurent des musiciens, et que la musique demeure l’espérance
des hommes. Telle avait été, pour cet homme chargé d’honneurs qu’il ne
sollicitait pas, et qu’il porta avec une dignité amère, sa clandestinité. La
musique en ces temps, on l’a dit, c’était la contrebande de la liberté.
Mais Bayreuth, ce fut l’apothéose
et, mieux encore que l’apothéose, tout simplement : l’accomplissement. Là,
avant la guerre, il avait dirigé un Ring et un Parsifal inoubliables. Là,
pendant la guerre, avec ce peu d’artistes de qualité qui lui restait disponibles,
et dans des conditions précaires, il avait donné cet ultime Meistersinger des
festivals que le disque a miraculeusement ressuscité. Comme on avait pu penser
que Furtwängler ne serait jamais débâillonné, on avait pu croire que Bayreuth
ne se relèverait jamais de la guerre et de ses ruines, de l’avant-guerre et de
ses fautes. Pourtant tous deux retrouvaient la parole : et pour ouvrir l’ère
du Nouveau Bayreuth, certes c’est Karajan et Knappertsbusch (avec Wieland
Wagner maître d’œuvre de visions nouvelles) qui dirigeaient les opéras. Mais l’acte
solennel, l’accomplissement sublime, c’est Furtwängler qui l’assuma :
comme Wagner, en 1876, avant d’inaugurer son Palais des Festivals, qui serait
voué à sa seule musique, avait sollicité l’auguste parrainage de Beethoven,
dirigeant lui-même la IXe Symphonie au Théâtre de la Margravine, ainsi, la
veille du grand jour (et trois quarts de siècle tout juste après Wagner), Furtwängler
bénissait Bayreuth renaissant en dirigeant la IXe Symphonie. De l’œuvre
immense, il a donné des lectures plus incandescentes et plus furieusement
sublimées. Mais aucune fois la circonstance n’avait été si vénérablement
solennelle. Le disque était là. Ce qu’il a fixé c’est un instant mystique de l’Histoire
de l’Occident. (André Tubeuf)
Ludwig van Beethoven,
Symphonie n°9 en rémineur, op125, avec Chœurs
1. Allegro ma non troppo, un
poco maestoso
2. Molto vivace
3. Adagio molto e cantabile,
Andante moderato, Adagio
4. Adagio, Allegro molto e
vivace
Elisabeth Schwarzkopf,
soprano
Elisabeth Höngen, contralto
Hans Hopf, ténor
Otto Edelmann, basse
Chœurs et Orchestre du
Festival de Bayreuth
Direction, Wilhelm Furtwängler
Enregistré au Festspielhaus
de Bayreuth le 29 juillet 1951
Il fut l'un des plus importants chefs d'orchestre de l'histoire de la musique classique occidentale, notamment grâce à ses interprétations de la musique symphonique allemande et autrichienne qui font encore référence pour les musicologues et les interprètes actuels.
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