En 1972, dans
« Frenzy », Alfred Hitchcock, le plus génial réalisateur avec David
Lynch, raconte l’histoire d’un pervers sexuel surnommé «le meurtrier à la
cravate » qui terrorise Londres. Pour la première fois, il filme frontalement
la nudité et l’obscénité dans un film ouvertement sadique. La scène de viol et
de strangulation où la blonde Barbara Leigh-Hunt dévoile ses seins, lui vaudra
d’ailleurs des ennuis avec la censure. De là à imaginer qu'il transpose ici ses
propres pulsions, il n'y a qu'un pas. Il faut dire que le cinéaste
a, depuis longtemps, la réputation de se montrer un peu trop proche de
certaines de ses comédiennes… et de leur faire vivre l'enfer. S’il a toujours
gardé d’excellentes relations avec Grace
Kelly, l’incarnation la plus iconique des blondes hitchcockiennes, il
n’en est pas de même pour la débutante Joan
Fontaine… qu’il gifle sur le plateau de Rebecca, parce qu’elle
n’arrive pas à pleurer. Ingrid
Bergman, qui tourne trois films avec lui, l'éconduit : il fait courir le
bruit qu’elle aurait refusé de quitter sa chambre s’il ne lui faisait pas
l’amour. Quand Vera Miles, dont
il veut faire sa nouvelle Grace Kelly, renonce à Sueurs froides, parce
qu’elle est enceinte, Hitchcock tyrannise sa remplaçante Kim Novak. Il lui impose de tourner
sans soutien-gorge, l’invite chez lui pour qu’elle lui révèle ses goûts
intimes, l’oblige à plonger plusieurs fois dans une eau glacée pour une scène
clé du film. Frustré par le tournage, il dira d’elle avec mépris : « Kim
Novak n'est qu'une inconsistante cire que j’ai eu les plus grandes peines du
monde à modeler. » Sur Psychose, la blonde Janet Leigh passe aussi sept jours sous la douche tandis qu'il la
filme sous tous les angles. Avec Tippi
Hedren, le sadisme vire au harcèlement sexuel. C'est en tout cas ce que
raconte l'actrice dans ses mémoires (Tippi : a memoir). Après l’avoir
découverte dans un spot télé, le cinéaste lui fait signer un contrat de sept
ans et la modèle selon ses fantasmes. Mais elle refuse ses avances. Durant le
tournage des Oiseaux, il lui fait subir cinq jours durant des attaques
de faux volatiles, jetés par des techniciens, et de vrais, attachés à elle. Le
dernier jour, un corbeau manque de lui crever un œil. Puis, sur Pas de
printemps pour Marnie, il lui demande de "le toucher" et se jette
sur elle pour l’embrasser dans une limousine. "C'était sexuel,
pervers", écrira la star. Quand elle casse son contrat, Hitchcock envoie
même à sa fille, l'actrice Melanie
Griffith, alors âgée de 5 ans, une poupée représentant sa mère dans un
cercueil…
Et
Hitchcock reste le plus grand réalisateur de toute l’histoire du cinéma – avec
Lynch selon mon goût -. Aujourd’hui s’il était vivant, le maître du suspens et
surtout de la construction psychanalytique, serait derrière les barreaux et
pour un long bout de temps. MeTooBalanceTonPorc va-t-il faire un procès à ce
génie humain ? Maintenant que l’on va fouiller dans tous les recoins et
que toutes les langues vont s’agiter, combien va-t-il rester de cinéastes,
d’écrivains, de peintres, de sculpteurs, de metteurs en scène, d’acteurs, de
directeurs de casting, de directeurs de théâtres, de directeurs d’opéra, de
chanteurs, de musiciens, de politiciens, etc..., etc..., etc.... Et quel sort
va-t-on réserver à ces autres génies que sont Sade, Rabelais, Millet
(Catherine), Desforges, Robbe-Grillet, Villon, et tous les autres ?
Faut-il interdire tous ces puits de culture qui n’ont décrit que les failles de
l’homme et de la femme et les ont parfaitement décrites puisqu’ils sont ou ont
été des failles modèle eux-mêmes. Dire que l’homme est un porc, même un porc de
génie, c’est un peu trop facile. Réfléchissons sur ce que les siècles passés nous ont
apporté, inculqué et ce qu’ils ont façonné en nous, et ce que le temps d'aujourd'hui laisse perdurer en toute liberté parce qu'on s'est trompé de société.
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